Fricassée de porc à la genevoise
Merci, pour l'idée des lardons et oignons caramélisés un régal - Cédric
Temps de préparation:
Temps de cuisson:
Difficulté: Moyenne
Ingrédients (4 personnes):
Voir ci-dessous
Préparation:
... De la Saint-Martin.
La petite histoire.
Dans l'Ajoie, région du canton du Jura en Suisse, on perpétue une très ancienne tradition lors du deuxième dimanche de la Toussaint - qui cette année tombe le 13 novembre : la fête de la Saint-Martin. Il s'agit d'une fête de la table qui célèbre la fin des travaux dans les champs et dont les nombreux plats sont essentiellement à base de cochon.
La Saint-Martin (11 novembre) représente la fin du cycle agricole annuel. Toutes les récoltes sont rentrées et les porcs sont gras. Mais la saison de repos et de restrictions s'annonce. Il n'y aura guère de réserves, les restes de repas seront réservés à la consommation humaine et le nourrissage des cochons s'avérera diffile. Le temps est venu de tuer le cochon.
Après l'abattage, une grande partie va être conservée par salaison, séchage et fumage mais d'autres parties devront être consommées immédiatement car il n'existait pas de méthodes de conservation. Hors, le goret ou la truie sont des animaux qui pèsent plusieurs centaines de kilos - voire jusqu'à 500 kilos et plus. Non seulement tuer le cochon et le mettre en conservation requérrait de nombreux bras mais il s'agissait de consommer une grande quantité de viande et autres abats sans délai.
C'est pourquoi "le jour du cochon" est devenu un des grands moments de la vie des villages ruraux et une occasion de convivialité festive. Pour beaucoup, la plus grande fête de l'année était la Saint-Martin. Toute la famille et les voisins - à charge de revanche - étaient mobilisés pour l'occasion ; les enfants étaient dispensés d'école. Les hommes de la maison préparaient une grande chaudière d'eau bouillante et une grande table, alors que les femmes préparaient les récipients, les torchons, le sel et les épices.
Le sang du cochon était précieusement recueilli dans une terrine et brassé pour éviter la coagulation. Puis le porc était nettoyé, découpé et les cochonnailles (boudin, saucisses, saucissons, jambons, noix, etc...) préparées.
S'en suivait le clou de la journée : le pantagruelique repas de la Saint-Martin. Estomacs sensibles, passez votre chemin... En Ajoie le menu est composé des plats suivants :
Le bouillon aux petits légumes (parfois accompagné d'une tranche de bouilli, mais dans ce cas, après le boudin),
La gelée (sorte d'aspic avec de la viande),
Le boudin noir accompagné de compote de pommes et d'une salade de racines rouges,
Les grillades et les atriaux accompagnés de... Rösti,
Le rôti, généralement avec une salade verte,
La choucroute garnie (si, si !) de jambon, porc frais, saucisse fumée d'Ajoie et accompagnée de pomme-de-terre,
Agapes closes par la crème brûlée, le "totché", un gâteau à la crème épaisse, plutôt salé. Et, éventuellement (parce-que faut pas abuser...), les "chtriflattes", sortes de beignets en forme d'escargot que l'on mange avec de la crème à la vanille.
Croyez-vous que le cochon soit ainsi fini d'être consommé ? Et bien non. Une semaine plus tard a lieu le Revira, une seconde "Saint-Martin" si vous voulez, où on remet le couvert en dégustant une nouvelle fois... Le menu complet. Bon appétit !
Le canton du Jura n'a bien sûr pas le monopole du jour du cochon. Tous les cantons suisses ont connu cette tradition qui en outre va bien évidemment au-delà des frontières helvétiques, jusqu'aux steppes de Sibérie.
Il en va ainsi de mon canton de Genève où malheureusement cette tradition est totalement perdue. Il en est néanmoins resté une recette fameuse et que j'adore, la fricassée de porc au sang à la genevoise servie avec une bonne purée, un gratin de pomme-de-terre - que j'appellerai "à la vaudoise" (i. e. au vin blanc et sans crème) car mon père, originaire de ce canton le faisait ainsi - ou un gratin de cardons qui est une autre spécialité, notamment agricole, du Genevois.
J'ai revisité pour vous la recette de la fricassée de porc à la genevoise tout en souhaitant vous transmettre une recette aussi proche de la réalité d'autrefois. Chers lecteur et lectrice que le sang de porc - qui est le composé essentiel de la recette ; sans quoi vous n'avez tout simplement pas une fricassée à la genevoise mais un râgout de porc - il vous est fort possible d'omettre cet ingrédient bien sûr (ingrédients qu'il faut aujourd'hui commander chez son boucher.).
* Petit quiz pour les historiens, les amoureux du cochon et mon cher lecteur qui a eu le coeur bien accroché pour me lire jusque là : qui a calculé la descendance d'une truie de douze ans ? Quel est ce nombre ? Et dans quel ouvrage trouve t'on la réponse à cette question essentielle pour l'Humanité ? Un indice :
Bel homme, ma foi !
***
La fricassée de porc à la Genevoise.
Ingrédients
Pour le porc (4 à 5 personnes).
800 G de ragoût de porc sans os.
1 Pied de porc coupé en morceaux.
100 G de lardons.
150 G de petits oignons.
1 Verre à liqueur de cognac (ou de marc).
1 C. à soupe de vinaigre de vin ou de pommes (plus doux ; ma préférence).
2 C. à soupe de farine.
1 Dl de sang de porc.
1 Dl de crème.
Saindoux que l'on peut remplacer par une huile de goût neutre (colza, tournesol...).
Sel et poivre du moulin.
Pour la marinade :
2 carottes
1 Morceau ou 1 branche de céleri.
2 Oignons piqués de clous de girofle.
2 Gousses d'ail.
1 poireau
2 Brins de persil.
2 Feuilles de laurier.
1 Pincée de marjolaine (origan) ou de thym ; frais en saison.
3 Ou 4 baies de genièvre écrasées.
1 Litre de vin rouge corsé (Gamay genevois).
Préparation :
Pelez les légumes de la marinade, coupez-les grossièrement, mettez-les dans une terrine avec les morceaux de viande, ajoutez persil, marjolaine (origan), laurier, genièvre et ce qu'il faut de vin rouge (un Gamay genevois chez nous) pour recouvrir entièrement la viande. Mélangez bien, couvrez et laisser mariner 48h voire trois jours en remuant plusieurs fois.
Sortez la viande et les légumes. Séparez la viande de tous les autres ingrédients. Passez le vin rouge dans une casserole. Donnez un tour de bouillon et gardez le au chaud.
Faites chauffer le saindoux ou l'huile dans une cocotte en fonte, ajoutez les cubes de viande, assaisonnez en sel et poivre. Faites colorer vivement de tous côtés. Ajoutez les légumes et faites les revenir rapidement en remuant. Assaisonnez à nouveau et saupoudrez avec la farine en continuant de remuer. Mouillez avec le vin rouge réservé en grattant le fond avec la spatule pour détacher les sucs. Amenez à ébullition et couvrez. Il est temps de baisser la chaleur et de laisser mijoter tout doucement pendant quoi ? 1h1/2 ; 2h ? Piquez au couteau pointu ; la viande doit être fondante.
Cette partie de la recette est revisitée à ma façon : avant la fin de la cuisson de la viande, faites caraméliser doucement les oignons pelés avec du beurre et un peu de sucre dans une poêle. Retirer les oignons et remplacez les par les lardons rapidement blanchis (important à mon avis car cela enlève un certain goût âcre) que vous faites rissoler rapidement.
Bon. Ben, il faut bien l'ajouter ce sang de porc, hein ?... Mélangez le avec le vinaigre et la crème. Passez cette sauce dans une casserole et faites-la réduire à feu vif. Versez le cognac. Réduisez encore mais peu et rectifiez l'assaisonnement. Ajoutez les oignons et les lardons à cette sauce et laissez les juste se réchauffer.. Ajoutez cette préparation dans la cocotte et mélanger délicatement (votre viande est fondante...). Dressez sur assiette, dans un plat ou directement dans la cocotte ; ce qui convient parfaitement à cette recette rustique.
En saison, vous pouvez ajouter des champignons frais tels que girolles (chanterelles chez nous), ceps (bolets) et trompettes des morts (cornes d'abondance) mes champis favoris pour cette recette.
Un petit jésus en culotte de velour, ça, à mon avis.
Bonne dégustation !
* Résultat du quiz :
Et bien, il s'agit de l'illustre Vauban (Sébastien Le Prestre, marquis de ; Maréchal de France), constructeur de forteresses et auteur de savants traités sur la défense desdites forteresses... Contrairement à la légende ; il ne finit pas en disgrâce quand bien même il eût quelques bisbilles avec Louis XIV qui dit de lui qu'il fût "un bon français." En revanche il se pencha bien sur le... Cochon. De l'élevage des porcins, il ne put s'empêcher de passer à la théorie en écrivant un traité intitulé... "Ma cochonnerie" (si, si !) dans lequel il s'est amusé à calculer la descendance d'une truie sur douze ans et est arrivé - en bon ingénieur - au remarquable total de :
6. 434. 838
Six millions et demi de petits héritiers aux groins charmants qui on tous - hélas pour eux mais pour notre plus grand plaisir bistronomique - finis dans une casserole.
J'espère que vous avez passé un bon moment lors de cette lecture.
***
Mots-clés: ceps, champignons, crème, fricassée, fricassée de porc à la genevoise, fricassées de porc, girolles, lardons, marinade pour le porc, oignons caramélisés, porc, sang de porc, trompettes des morts
Publié par mamancbon!
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Cédric, Nimis et = ont voté.Ils ont envie d'essayer
Invité, Invité et trouvent que ça a l'air rudement bon.Ça leur plait!
utilisateurs aiment cette recette!
13 commentaires
mamancbon!
Merci Christal, merci Ana.
Belle journée à vous malgré le temps maussade (ici en tout cas).
Ana Luthi
Un petit plat comme je les aime... ;O))) Bon week end!
Christal
je lis que les traditions de ton pays pour la st Martin sont les meme que chez moi en franche-comte, mais nous sommes voisins.
merci pour toutes ses belles histoires.
bonne journee